Les mains d’Anne de Vandière
Anne de Vandière, journaliste de métier, a eu l’idée de faire le portrait de personnes qu’elle côtoie dans sa vie professionnelle et familiale en photographiant leurs mains. Ce livre a été édité à l’occasion de l’exposition H/AND, organisée par la Maison européenne de la photographie. Le travail d’Anne de Vandière a été retenu en 2002 par la société Hermès pour illustrer le thème de l’année : la main.
Lorsque Sophie Calle demande à des gens de raconter en quelques phrases le moment le plus douloureux de leur vie pour donner naissance à « Douleur exquise », Anne de Vandière demande à des gens de parler de leurs mains pour réaliser « H/AND ». Cette démarche participative met le lecteur dans la confidence en lui faisant découvrir une parcelle d’intimité de ceux qui se livrent à cette expérience. H/AND est plus qu’un livre de photos car chaque image est complétée par un texte, le commentaire de l’intéressé sur ses propres mains. Plus de 115 personnes (il y a quelques couples) se sont livrées à cet exercice donnant 115 photos de mains. Sur la page de gauche se trouve le texte qui est accompagné d’un tout petit portrait de celui ou celle à qui appartiennent les mains qui figurent sur la page de droite. Les photos deviennent indissociables des textes. Toutes les images sont en noir et blanc elles sont présentées sur des fonds blancs, gris ou noirs. Les photos et les textes sont de Anne de Vandière, sauf Jacques Attali, Marie-Liesse Besse, Fabienne Verdier, et Fabien Verschaere pour leurs textes.
Cette mise en page donne de la profondeur aux images. Ce travail réalisé sur une durée de cinq années montre toutes sortes de mains, des mains d’enfants, d’hommes, de femmes, de jeunes, de vieux. Les personnes photographiées gravitent, la plupart du temps dans l’univers de l’architecture, du design, du stylisme, de la photographie, de l’art en général. Certaines restent très neutres dans leur témoignage, d’autres se livrent. Peter Beard (photographe) n’aime pas ses mains, il n’a aucune relation particulière avec elles, il ne se masturbe même pas. Marie Merclé (chapelière) nous confie « pendant un an ma main droite a eu un tic nerveux. Un décrochement bizarre [...°]. Elle a dû se dire qu’elle allait se faire virer car elle est subitement redevenue normale ». Annette Messager nous apprend que sa mère lui disait que ses mains étaient affreuses et son nez vilain, qu’elle ne trouverait jamais de mari à cause de cela. Son grand plaisir était de voir le chemin qu’empruntait le fil qu’elle se passait sous la peau de la main à l’aide d’une aiguille... Un témoignage des plus émouvants est celui de Denis Chatelier (premier greffé des deux mains) qui vit avec les mains d’un autre et qui dit « Lorsque je les aurai récupéré entièrement, ma tête se videra de tout ce que j’ai vécu et je pourrai à nouveau travailler, construire ». Enfin Agnès b (styliste) nous étonne en nous révélant qu’à dix-huit ans, Maïa Noël lui a lu les lignes de la main, sa prédiction disait « que je m’occuperai d’art, que j’avais des talents artistiques ...et que je deviendrai très célèbre, alors que j’étais d’une timidité extrême... Je crois que j’ai commencé à m’exprimer à l’age de trente ans ». Cette prédiction de Maïa Noël nous trouble quand on connaît l’ascension d’Agnès b dans le monde de la création. Ces textes, pour la plupart, sont pleins de sensibilité. Ils nous dévoilent un peu plus que le vécu des mains de ceux qui les ont écrits. En fait cet étrange miroir qu’est la main, éclaire le visage ce ceux qui s’y regardent et s’y découvrent.
Paris Musées (Editeur)
Anne de Vandière (Photographe
Parution : 01/04/2004
23x27 cm relié, 272 pages, 115 photos
ISBN : 2-87900-81
Prix : 39 euros