L’instant amoureux
Auteur de dix romans, d’une pièce de théâtre, Prix Goncourt pour La Dentellière (1974), Pascal Lainé publie son troisième livre de photo de nus. Cet agrégé de philosophie disserte longuement sur les relations entre le photographe et son modèle. Comme pour se disculper de son voyeurisme, le philosophe photographe prend à témoin le lecteur pour qualifier son modèle d’exhibitionniste. Pascal Lainé dénonce au passage la place de la femme dans la société de consommation et notamment l’exploitation commerciale de son corps. Il explique et motive sa démarche mais le résultat photographique n’est pas convaincant.
“Pour photographier un nu, il ne suffit pas qu’un homme, qu’une femme, se déshabille complaisamment devant l’objectif. Le modèle ne sera pas nu tant que son regard, ou la pose, ou sa volonté même de s’exhiber feront écran, occultant l’offrande de sa chair. Strip-tease, peep-show, etc., ne nous livrent aucune image vraie de la nudité, mais ne montrent d’ordinaire que des filles à poil. La chair n’est pas à vendre, ou bien l’acheteur ne trouvera qu’une effigie sur un emballage de papier, entre le code-barres et l’étiquette du prix. On lui a fourgué le vide creusé par son propre désir. La nudité - celle du moins que nous cherchons ici - est offrande, abandon. N’est pas modèle qui veut. Se rendre nu(e) est un art. On y offre son image à qui veut en jouir, et d’abord à soi même. C’est le contraire de l’exhibition qui, en revanche, instaure une relation organisée avec un "public". (...)”
Pascal Lainé
Avec ses textes prometteurs on s’attend à des images qui magnifient l’offrande du corps, l’abandon du modèle, des images qui révèlent sa complicité avec le photographe. Des éclairages hasardeux et des cadrages ordinaires, ne sont pas toujours à la hauteur des mots qui précèdent les images. Le photographe dirige le modèle pour qu’il puisse viser à loisir son sexe, qui devient le point de mire de la grande partie de ses clichés, l’aspect répétitif de cette technique devient lassant. On cherche la mise en valeur des courbes, le galbe d’un sein, l’arrondi des fesses qu’on a pu apprécier il y a longtemps, chez un photographe comme Lucien Clergue. Dans son ouvrage intitulé « née de la vague », il y avait peu de mots mais on sentait dans chaque image l’abandon du modèle. Ici nous avons l’impression que le photographe a fait des essais et qu’il nous les livre tels quels, sans avoir approfondi chaque technique, sans avoir sélectionné ses images. Cela donne des petites séries de type : éclairage rouge, corps recouvert de papier bulles ou tissu transparent, de boue, éclairage de nuit avec un faisceau de lumière, photos classiques à la manière de. . .
On aurait aimé un livre composé principalement de ses images de corps nus photographiés de nuit, balayés par un rayon de lumière. Ces quelques images apportent une contribution réellement originale à la photo de nu par une esthétique nouvelle et par une technique particulière où le photographe caresse à distance le corps du modèle avec un rayon de lumière. Pascal Lainé a rencontré cet « instant amoureux » en réalisant ce travail mais il n’a pas totalement réussi à nous le transmettre en image.
Marval (Editeur)
Pascal Lainé (Photographe)
Parution : 7 avril 2006
Format : Relié
Dimensions (en cm) : 24,5 x 31
160 pages, 110 photos
ISBN : 2862343862
Prix : 49€