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Sœurs, Saintes et Sibylles - Nan Goldin à la chapelle de la Salpêtrière

D’abord il faut franchir le porche de l’hôpital, ce n’est pas habituel d’aller voir une exposition dans un hôpital. Il faut ensuite se diriger vers la chapelle qui est au bout de l’allée. Dans la première salle de la chapelle, le fond du mur est totalement noir, un escalier métallique noir nous fait monter à plus de sept mètres du sol pour rejoindre une passerelle.

© Didier Gualeni

Un compteur affiche en rouge le nombre de personnes en train d’assister à la représentation, qui dure 35 minutes. Il ne faut pas être plus de 80 personnes en même temps sur la passerelle, pour des raisons de sécurité.
En haut de l’escalier, une petite porte donne sur une grande sacristie arrondie, les fenêtres sont obstruées par du tissu noir. Seuls trois vitraux ne le sont pas, une allusion à Sainte Barbe, qui enfermée dans sa tour par son père, a fait ouvrir une troisième fenêtre. En face de nous, trois écrans géants et en dessous de nous en plein milieu de la salle, dans l’obscurité, un lit avec une femme nue, en cire, qui est allongée. Un dessus de lit lui recouvre le corps des pieds jusqu’au ventre. Posée sur une table de nuit, une lampe de chevet est allumée. Sur les trois écrans vont s’enchainer des images qui retracent la vie de Sainte Barbe puis celle de Barbara sa sœur, à l’aide de vieilles photos de famille, de vidéos, d’images fixes de Nan Goldin.

Installation Nan Goldin à la chapelle de la Salpêtrière
Photo Didier Gualeni

Ces images nous racontent la courte vie de Barbara, internée en hôpital psychiatrique parce qu’elle était jugée trop rebelle par ses parents. A 18 ans, à l’issue d’un séjour à l’hôpital, elle se suicide en se jetant sous un train.
Nan Goldin nous montre sa sœur toute petite, puis elle grandit, joue du piano, on voit son frère, ses parents. Nan a 11 ans au moment des faits, ses parents tentent de lui cacher la vérité.
Nan Goldin revient sur les traces de sa sœur, nous fait visiter l’hôpital psychiatrique où elle était internée, se promène le long de la voie ferré où sa sœur a trouvé la mort, l’hôpital où elle est décédée, sa tombe. Les images sont accompagnées par la voix de Nan en anglais. Elle nous fait voir aussi sa vie à elle, les drag queens de Boston qu’elle fréquente dès l’âge de 14 ans après avoir quitté la maison familiale.
Et puis il y a cet épisode douloureux où elle-même, l’an dernier, séjourne en hôpital psychiatrique à la suite d’une grave dépression. On la voit se mutiler en s’écrasant ses mégots de cigarettes sur l’avant bras, cet avant bras plein de plaies qui se creusent et qui ne cicatrisent pas tant l’opération de d’autodestruction est répétitive. Elle continue à prendre des photos des femmes enfermées avec elle.
Cette installation sort de l’ordinaire : par le lieu, qui fait allusion à la mort et à l’enfermement, par le contenu si intime qu’elle nous expose, par la diversité des images, qui pour certaines, n’ont pas été réalisées par l’artiste mais par des proches.
Nan Goldin nous livre un cri de révolte, un cri fatigué, un cri émouvant. Son art c’est sa vie, son équilibre, sa fragilité.

Exposition réalisée dans le cadre du Festival d’Automne à Paris
http://www.festival-automne.com
Une plaquette est disponible avec un texte en français de Nan Goldin

Chapelle Saint-Louis de la Salpêtrière 47 boulevard de l’Hôpital 75013 Paris
Métro Gare d’Austerlitz
Renseignements : 01.53.45.17.17
Du 16 septembre au 1er novembre 2004
Du lundi au samedi 10h30 à 15h et de 16h à18h30.
Dimanche de 10h30 à 15h
Entrée libre
Scénographe, Raymonde Couvreu
Réalisation et montage du triptyque, Nan Goldin et Raymonde Couvreu