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Les rétrovisions de Daniel Schick

Daniel Schick voit Paris à travers un rétroviseur, sans se faire remarquer, il prend incognito par miroir interposé, celui du réflex, celui de sa moto. La pellicule capte l’image garce à ce jeu de miroirs. Daniel Schick nous raconte comment sont nées ses rétrovisons.

"L’appareil photo, un accident. Un ami l’a abandonné sur un canapé. Je l’ai pris sous ma protection. Je suis descendu de chez moi avec lui. Mon corps ne savait pas quoi faire du sien. Je fus attiré par l’ombre parfaite d’un rétroviseur de moto, projetée avec grâce sur un mur clair. Dans le rétroviseur, je vis un réverbère. Tel un enfant prêt à commettre une grosse bêtise, je sortis l’objet noir de mon sac à dos. Je me mis à enchaîner les déclics comme un tueur peut vider les balles de son fusil.
Cette première expédition ne dura que le temps d’une pellicule de trente-six poses. Rentré chez moi, je posai l’appareil sur ma table de chevet. L’appareil que quelques heures auparavant je ne connaissais pas allait dormir à côté de moi. Le lendemain matin, ma priorité fut d’aller chercher les photos. Elles étaient encore plus saisissantes que le souvenir de la prise de vue. Très vite, je décidai que mon île serait mon unique territoire de chasse.

Quelques pellicules plus tard, je réalisai que je me retrouvais à nouveau dans une "affaire" de miroirs. À la radio, l’interviewer que je suis tendait, au début de ses émissions, des miroirs à ses invités - miroirs dans lesquels je ne supporte mal de me voir, refusant d’avoir à contempler les dégâts que le temps est capable de faire. Cocteau a évoqué la traversée du miroir. Je les ai tendus aux autres, je les ai emprisonnés dans mes émissions et mes photographies afin de retarder le moment où je devrais traverser celui qui ne permet aucun retour.
Photographier, faire des émissions de radio produit la même jouissance, celle de l’instant, celle de l’immédiateté. L’obligation est la même : il faut provoquer l’émotion, la saisir, ne rien repousser. Une confidence après une émission, c’est trop tard. Un couple qui quitte un banc avant que vous ne l’ayez photographié, c’est trop tard. Il s’agit d’être totalement dans le maintenant, de se coucher dedans et de ne surtout pas s’endormir."

Daniel Schick

Parallèlement à la sortie du livre "je, tu, île, mes îles Saint Louis" et à l’exposition "Rétrovisions", Daniel Schick a imaginé l’accrochage d’une dizaine de photographies en couleur et noir et blanc en face même du lieu où elles ont été prises : l’île Saint Louis. Situé entre la MEP et l’île Saint Louis, le square Albert Schweitzer permet au spectateur de passer d’un monde photographié à un monde réel. L’idée de Daniel est que l’île conduise à l’exposition et que l’exposition conduise à l’île. Cet accrochage est réalisé en collaboration avec la Mairie du 4ème arrondissement de la Ville de Paris.

Le site internet de Daniel Schick http://www.danielschick.com

Catalogue

À l’occasion de l’exposition, un livre est publié par Le Seuil.
"je, tu, île, mes îles Saint Louis"
Textes et photographies de Daniel Schick
ISBN : 2-02-067296-0
Format : 225 x 280 mm
160 pages, 94 photographies, broché
Prix : 30 Euros

Informations partiques
Du 3 novembre 2004 au 2 janvier 2005
Maison européenne de la photographie
5/7 rue de Fourcy, 75004 Paris
Ouvert tous les jours de 11 heures à 20 heures sauf les lundis, mardis et jours fériés
Accès à la billetterie jusqu’à 19h30
Métro : Saint Paul ou Pont Marie
Bus : 67, 69, 96 ou 76